Hommage à André Viricel (1913-2003).
Texte écrit par Yves Roussel, président de l'ADCS


« Il reste d’un homme
ce que donnent à songer son nom,
et les oeuvres qui font de ce nom
un signe d’admiration, de haine ou d’indifférence. »
Paul Valéry

André Viricel a quitté ses crayons, ses compas, ses amis ce 15 août 2003.

J’ai eu la chance de connaître ce grand Monsieur il y a trente ans ; les vacances scolaires nous avaient amenés en cet été 1973 dans le Queyras où nous nous sommes revus souvent, et où nous avons tant bavardé. En fait, depuis la naissance du Petit Archimède et de l’ADCS en 1972, c’était déjà de nombreuses lettres que ce jeune retraité et moi avions échangées avec des textes pour notre revue, des suggestions ou des critiques. André Viricel, membre de l’association dès 1973, devint rapidement le pilier de notre comité de rédaction, puis administrateur de l’ADCS, et il avait été élu membre honoraire de l’ADCS.

André Viricel, en 1978

Chance : ce mot me fait penser à ce beau poème de Paul Géraldy « Chance », écrit dans un contexte bien différent de celui de l’ADCS. Oui, André Viricel nous a souvent dit que notre rencontre (lui et les amis de l’ADCS) fut une chance pour lui qui redoutait une retraite oisive ! Oui, Chance bien partagée : s’être rencontrés, avoir pu travailler ensemble, connaître les pensées de cet humaniste, ô combien cultivé.

La petite phrase de Paul Valéry mise en exergue, nous en avons souvent discuté ensemble. J’ignorais que je la reprendrais, pour lui, dans cette brève note. Sa réserve et sa modestie extrêmes auraient souffert de tout éloge à lui destiné. Alors j’évoquerai ici quelques simples souvenirs qui vous permettront un peu de bien camper ce formidable ami et vous dire ainsi ce « qu’il reste »  d’André Viricel pour ceux qui ont eu la chance de le fréquenter. En faisant parler tout d’abord deux de ses anciens élèves :

L’activité de Viricel à l’ADCS, celle pour sa régionale APMEP, c’était déjà beaucoup, beaucoup ! Eh bien non. Pour meubler le temps qui lui reste, André lit pour les non-voyants des livres qu’il enregistre sur cassettes (bien entendu bénévolement). Trois petites historiettes.

André Viricel, amoureux de géométrie était aussi épris d’arithmétique et de calcul, et dans les milliers de pages reçues de lui, nous avons des cubes, hypercubes, des carrés magiques, bi-tri-magiques, … Avec grande simplicité, il m’avoua récemment qu’il aurait souhaité faire contrôler « automatiquement » et séparément (en plus de ses propres contrôles) qu’un de ses récents carrés était trimagique. Entendez par-là magique au sens habituel des lignes, colonnes et diagonales, mais aussi magique si chacun de ses nombres était élevé au carré ou au cube. Ce carré trimagique est déjà fort impressionnant, 32 lignes, 32 colonnes, soit 1024 nombres. Fort heureusement, un de nos amis, Christian Boyer, brillant informaticien et membre de notre association le tira de ce mauvais  pas. Le carré de Viricel est bien trimagique, et c’est à partir de ce travail original que Christian développera, et créera le premier carré pentamagique (voir à ce sujet la revue Pour La Science d'août 2001), joli monstre de 1024 lignes, 1024 colonnes soit de 1.048.576 nombres. Pour ce travail nos deux amis ont reçu en 2002 les deux premiers Hanoï d'Or de l’ADCS ; André Viricel félicitera légitimement notre jeune ami, et par ailleurs, vous trouverez dans le numéro de Septembre 2003 de Pour La  Science un joli coup de chapeau de Christian à André, hommage que le destinataire n’aura malheureusement pas connu (Christian Boyer vient en effet de prolonger ses recherches et vient de créer les premiers cubes trimagiques et tétramagiques).

L’ami est parti, mais sa bonté et sa générosité jamais en défaut, sa rigueur et ses exigences tant pour lui-même que pour autrui, son besoin profond de toujours aider et de faire connaître ce qui, pour lui,  était bon et juste, le respect profond qu’il éprouvait pour les autres et que ceux-ci lui rendaient bien font que nous mesurons à sa juste valeur la grande chance de l’avoir connu. Ce Monsieur au si grand cœur a marqué ses élèves et ses amis. Peut-on vraiment parler de ce qui reste d’André Viricel ? Oui, … tout.

Yves Roussel
Président de l’ADCS
25 Août 2003


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