Le plus petit carré bimagique possible
Voir aussi le plus petit carré bimagique possible utilisant des entiers distincts
Voir aussi le plus petit cube bimagique possible


Le plus petit carré multimagique ne peut être qu'un carré bimagique (2-multimagique). Quel est le plus petit carré bimagique possible ? Les plus petits carrés bimagiques connus sont d'ordre 8, donc du même ordre que le premier bimagique découvert en 1890 par Pfeffermann. Le mythique bimagique d'ordre 7 serait-il possible ?


Carré bimagique d'ordre 3 ou 4 ?

Le célèbre Edouard Lucas, qui rédigeait également des articles dans Les Tablettes du Chercheur, prouva facilement qu’il ne pouvait exister de carré bimagique d'ordre 3 même composé de nombres non consécutifs (inégaux), ni de carré bimagique classique d'ordre 4 composé de nombres consécutifs. Cette démonstration fut publiée le 1er mars 1891, quelques semaines à peine après la parution du premier carré d'ordre 8 de Pfeffermann, et très peu de temps avant qu'Edouard Lucas ne meure accidentellement, hélas, en cette même année 1891.

Mais il est toutefois possible de construire des carrés d'ordre 4 qui sont au moins semi-bimagiques (= diagonales non magiques ni bimagiques) et non-normaux (= utilisant des entiers différents et non consécutifs), comme l'exemple suivant que j'ai construit en 2003. Pour les 4 lignes et les 4 colonnes, la somme magique est 143 et la somme bimagique est 7063. Il est impossible de construire un carré de mêmes caractéristiques (entiers différents, et supérieurs ou égaux à 1) avec des entiers plus petits. Mais il est possible d'en construire d'autres avec des entiers plus grands.

Répondant au puzzle 287 "Multimagic prime squares" proposé par Carlos Rivera dans son site http://www.primepuzzles.net/, le Dr. Luke Pebody, du Trinity College de Cambridge, Angleterre, et Jean-Claude Rosa, France, prouvent indépendemment en octobre 2004 qu'un carré bimagique non-normal d'ordre 4, donc composé d'entiers distincts, est impossible. Lire ici la jolie et courte démonstration de Luke Pebody.

Voir aussi le problème du carré presque bimagique d'ordre 4 utilisant des entiers distincts.


Carré bimagique d'ordre 5 ?

Pour les carrés d'ordre 5, il n’existe que 8 séries de 5 entiers distincts, compris entre 1 et 25 (=5²), ayant pour somme 65 (somme magique = 5x(5² + 1)/2) et pour somme de carrés 1105 (somme bimagique = 5x(5² + 1)*(2x5² + 1)/6) :

Il est évident que ces 8 séries ne sont pas suffisantes pour construire un carré bimagique d'ordre 5 puisqu’il faut au moins 12 séries (5 lignes, 5 colonnes et 2 diagonales). Et par exemple le 3 ne peut jamais être présent.

Voici un carré magique, que l'on retrouve dans beaucoup d'ouvrages, et qui est partiellement bimagique. Deux lignes, deux colonnes et les deux diagonales sont bimagiques. En fait, les diagonales sont même trimagiques.

Voir aussi le problème du carré bimagique d'ordre 5 utilisant des entiers distincts.


Carré bimagique d'ordre 6 ?

Il est plus difficile, mais faisable, de démontrer qu’aucun carré bimagique d'ordre 6 ne peut exister. On peut toutefois avoir un carré partiellement bimagique comme ce carré magique où toutes les colonnes sont bimagiques, mais hélas pas les lignes, ni les diagonales :

Et voici un autre carré d'ordre 6 toujours de Pfeffermann, mais ce coup-ci semi-bimagique non-normal. Il utilise des nombres entiers non consécutifs entre 1 et 49. Le carré est magique. Les 6 lignes et 6 colonnes sont bimagiques. Seules les diagonales ne sont pas bimagiques.

Voir aussi le problème du carré bimagique d'ordre 6 utilisant des entiers distincts.


Carré bimagique d'ordre 7 ?

En 1891, G. Pfeffermann publiait dans le quotidien L'Echo de Paris un carré d'ordre 7 partiellement bimagique. Son carré est magique, et a 4 lignes bimagiques et 4 colonnes bimagiques.

Dans un carré d'ordre 7, il y a 49 cellules. Il faut donc placer les nombres de 1 à 49, soit donc 25 impairs et 24 pairs. La somme S1 des éléments d’une rangée d’un tel carré doit être égale à 7*(49+1)/2 = 175. La somme S2 des carrés des éléments d’une rangée doit être égale à 7*(49+1)*(2*49+1)/6 = 5775, qui est de la forme 4k+3.

Les carrés des nombres pairs étant de la forme 4k, et les carrés des nombres impairs étant de la forme 4k+1, une somme de 7 carrés ne peut faire 4k+3 que si la rangée contient 3 ou 7 nombres impairs. Pour caser 25 impairs sur 7 rangées, la seule possibilité est donc d’avoir :

D’où la question majeure : existe-t-il des séries de 7 impairs distincts, compris entre 1 et 49, dont la somme fait 175 et la somme des carrés fait 5775 ?

En 1892, Michel Frolov, dans le bulletin de la renommée Société Mathématique de France, affirmait qu’il n’existe aucune de ces séries : il en conclut donc qu’aucun carré bimagique d'ordre 7 ne peut exister. Erreur, Monsieur Frolov ! Mais nous lui pardonnerons, car l’informatique n’existe pas encore à son époque. En fait, j'ai trouvé exactement 60 séries ayant ces propriétés, comme par exemple :

Pour pouvoir constituer une ligne et une colonne d’un tel carré, il suffit qu’il existe au moins un couple de 2 parmi ces 60 séries ayant un et un seul élément en commun. Si nos calculs sont justes, il y a exactement 424 couples possibles parmi ces séries de 7 impairs. Par exemple les séries G2 et G13 citées ci-dessus ont en commun le seul nombre 49, le nombre 49 sera alors l’intersection ligne/colonne du couple G2/G13.

Si on ne se limite pas à la parité, il existe 1844 séries de nombres distincts, pairs ou impairs, compris entre 1 et 49, dont la somme fait 175 et la somme des carrés fait 5775. La liste de ces 1844 séries a été publiée dès 1909 par Achille Rilly dans Sphinx-Œdipe. Sans informatique, saluons l’exploit !

Il est possible de construire un programme informatique qui, à partir de ces 424 couples, puis en puisant parmi les 1844 séries, essaye de construire un carré bimagique. Sauf erreur de programmation de ma part, j’affirme qu’un tel carré bimagique d'ordre 7 n’existe pas. Mais… voici toutefois un exemple de carré d'ordre 7 que j’ai obtenu, justement à partir du couple d’impairs G2 / G13 présent en 1ère ligne / 6ème colonne.

Où sont ses failles ? Mon défi : trouverez-vous mieux ? Est-il magique ? Est-il bimagique ? Je vous laisse prendre votre calculette, ou votre tableur, et tapoter. Alors, où sont les failles magiques ou bimagiques de ce carré ?


Suite à ce défi, Walter Trump (Allemagne), a essayé d'approcher le carré bimagique d'ordre 7. Il a abouti informatiquement à la même conclusion que la mienne : le carré bimagique 7x7 ne peut exister. Puisqu'il est prouvé (voir plus haut) qu'un carré bimagique d'ordre 7 doit utiliser un couple de séries bimagiques de 7 nombres impairs parmi les 60 séries existantes, Walter Trump -comme moi- a directement cherché des carrés utilisant un couple de ces séries. Voici un de ses carrés "quasi" bimagiques (le couple utilisé étant en gras) qui a également 3 sommes bimagiques erronées mais qui s'approchent de plus près de la somme bimagique correcte. Somme des 3 écarts = 866, contre les 928 de mon carré ci-dessus.


En avril 2004, on peut confirmer et affimer qu'il n'y a pas de carré bimagique d'ordre 7.

En effet, même si nous n'avons pas (encore) de preuve mathématique, Bogdan Golunski, Allemagne, confirme également qu'il est impossible de construire un tel carré bimagique. Avec trois personnes différentes, qui utilisent trois programmes différents, et qui arrivent à la même conclusion, on peut sans crainte affirmer le résultat.


En décembre 2004, une quatrième personne avec un quatrième programme différent a trouvé qu'il est impossible de construire un carré bimagique d'ordre 7. Pan Fengchu, Chine, a trouvé qu'il y a 86 carrés "quasi" bimagiques ayant seulement trois mauvaises sommes S2, et qu'il est impossible d'obtenir un meilleur résultat.

Ses carrés utilisent une ou deux séries de 7 nombres impairs. Ses carrés #26 et #86 sont ses meilleurs carrés ayant la plus petite somme des 3 différences = 348, et utilisant une seule série de 7 nombres impairs (ci-dessous en gras). On peut considérer, comme le remarque Walter Trump, que ces deux carrés sont les mêmes : le carré #86 peut être construit à partir du carré #26, en le complémentant (50-x) et en appliquant la permutation 6-7-3-4-5-1-2 des lignes et colonnes. En fait, les 86 carrés de Fengchu peuvent être réduits à 43 vraiment différents. Parmi eux, on peut reconnaître des carrés déjà connus: son carré #25 (et #46) est le carré de Trump, et son carré #76 (et #11) est le carré de Boyer.

 


En juin 2005, j'ai construit les premiers carrés magiques 7x7 de carrés. Cet exemple utilise des entiers carrés consécutifs. Cela indique que l'impossibilité d'un carré bimagique d'ordre 7 ne provient pas d'une impossibilité de ranger ses entiers carrés en carré magique.

Voir aussi le problème du carré bimagique d'ordre 7 utilisant des entiers distincts.


En août-septembre 2012, Francis Gaspalou et Walter Trump ont prouvé que le plus petit ordre d'un carré bimagique axialement symétrique n'est pas 8, mais 12.

Ouvrir leur fichier PDF (en anglais).


D.N. Lehmer et le problème du plus petit carré bimagique

D.N. Lehmer en 1934 (Somerset, Indiana, 1867 - Berkeley, California, 1938)

Le mathématicien américain D.N. Lehmer s'est intéressé aux carrés magiques. Par exemple, il a publié en 1929 un article intitulé On the congruences connected with certain magic squares publié dans les Transactions of the American Mathematical Society (AMS). Voir aussi ses travaux dans d'autres domaines :

Lors d'un meeting AMS qui eut lieu à l'Université de Californie à Los Angeles, le 1er décembre 1934, il a présenté un travail intitulé Bimagic squares. En voici son résumé :

Ce résumé seul a été publié par l'AMS, l'article complet n'ayant jamais été publié. Il semble que cet article de Lehmer soit hélas aujourd'hui perdu. Remerciements à :

Après avoir étudié le problème des carrés bimagiques d'ordres 3-4-5-6, D.N. Lehmer a aussi étudié l'ordre 7. Lors de sa revue du livre Carrés Magiques au Degré n du Général Cazalas, D.N. Lehmer écrivait en 1935:

Mais il semble que D.N. Lehmer n'a jamais répondu à cette question sur l'ordre 7. Il mourait trois ans plus tard, en 1938.

Références: Bulletin of the AMS, Volume XLI, 1935, pages 18, 146-147, et 316-317


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